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Un grand orgue montréalais en route pour la Virginie

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Lorsqu’on entre chez Juget-Sinclair, rue Mill, à Montréal, on fait rapidement une rencontre hors norme : sur notre gauche, un grand orgue si imposant qu’il occupe les niveaux de l’atelier.

Après deux ans de travail, le facteur d’orgues Juget-Sinclair, une équipe d’artisans spécialisés dans la fabrication et l’entretien d’orgues mécaniques, s’affaire à démonter l’instrument pièce par pièce pour le livrer en Virginie, où il deviendra l’âme de la cathédrale du Sacré-Cœur de Richmond.

« Un orgue comme celui-ci qui sort du Québec, ça n’arrive presque jamais. »

Une citation de Robin Côté, président de Juget-Sinclair

L’Opus 55 est l’orgue le plus imposant à sortir de l’atelier de Juget-Sinclair. Pesant environ 15 tonnes, il est quatre fois plus gros qu’un orgue de chœur, qui sert lors des cérémonies religieuses.

Il sera utilisé pour les grandes cérémonies, les grands-messes, mais aussi les mariages, les grandes funérailles. Tous les moments importants de la vie des gensdétaille Robin Côté, lui-même organiste.

Robin est assis sur le banc devant l'orgue.

Installé à Montréal depuis 1994, Juget-Sinclair est le troisième facteur d’orgues en importance au Québec, derrière Casavant Frères et Létourneau, tous deux établis à Saint-Hyacinthe.

Le nouvel orgue, une véritable œuvre d’art empruntant le style néorenaissance de son lieu d’accueil, est le deuxième instrument d’une commande de trois que l’auguste cathédrale du Sacré-Cœur de Richmond a passé au facteur.

Le premier instrument, un orgue de chœur, a été livré l’an dernier. Le travail sur le troisième instrument, un petit orgue d’accompagnement aussi appelé orgue coffre, en est déjà au tiers de sa construction.

Un grand orgue dans un atelier, à côté des travailleurs.
Environ 96 % des tuyaux de l’Opus 55 ont été produits à Montréal. Les 4 % restants, qui correspondant aux plus gros tuyaux, ont été moulés en Europe. Photo : Radio-Canada / Philippe-Antoine Saulnier

Recevoir une commande pour un orgue de tribune neuf comme l’Opus 55, accompagné de deux autres instruments, ça n’arrive pas tous les jours.

Cette commande est attribuable à une réputation bâtie depuis près de 30 ans, d’abord par le duo Denis Juget et Stephen Sinclair et ensuite par tous les gens qui sont passés par l’atelierinsiste Robin Côté.

Car un orgue n’est pas l’œuvre d’une seule personne, c’est l’œuvre d’une équipe où chacun a ses connaissances et se surpasse dans celles-cidit-il.

« L’orgue est une œuvre totale. […] On est comme des peintres, et les clients nous préfèrent selon nos tableaux précédents, sans avoir vu le nouveau. »

Une citation de Robin Côté, président de Juget-Sinclair

Celui-ci s’inclut dans l’équation. Il a intégré l’équipe du facteur il ya 22 ans et est passé par toutes les spécialitésde la conception à l’harmonisation, en passant par la tuyauterie et l’ébénisterie… jusqu’à devenir actionnaire et président de Juget-Sinclair.

Fabriquer un orgue ne s’apprend pas à l’école, du moins, pas en Amérique du Nord. C’est un savoir-faire qui se transmet de maître à apprenti depuis l’Antiquité, souligne M. Côté.

Les frères Casavant, qui ont commencé au 19e siècle, ont appris avec Louis Mitchell, un Canadien français qui, lui, a appris avec Samuel Russell Warren, qui venait des États-Unis. Et lui, il a été informé d’un facteur en Angleterreraconte Robin Côté. On a des connaissances qui se transmettent depuis des centaines d’années, et moi, je les transmets aux autres.

L’orgue est le seul instrument qui requiert des compétences en ébénisterie, en métallurgie, en mécanique, en ingénierie, en forgerie et en architecture, pour n’en nommer que quelques-unes. Savoir jouer n’est pas essentiel, mais ça aide énormémentsouligne-t-il.

Le son des orgues Juget-Sinclair est bien montréalaismais emprunte aux traditions allemande, française et nord-américaine.

Ça crée une sonorité unique, créée par nos oreilles, notre goût. C’est ce qui fait que les orgues de chaque compagnie ne sonnent pas de la même façon.décrit M. Côté.

L’Opus 55 en quelques notes

Écouter0 min 59 sec

Et une signature bien locale s’y trouve : les boutons de registre, aussi appelés jeux, qui permettent de sélectionner le son du hautbois, de la trompette ou de 65 autres instruments, sont identifiés en français.

Parce qu’on est des Montréalais, Québécois, et nous, on travaille en français. […] Personne ne s’en est plaint, même qu’ils aiment çalance-t-il.

Comment fonctionne un orgue mécanique?

Lorsqu’on appuie sur une touche, celle-ci actionne un levier qui fait déplacer un fil en fibre de carbone, attaché à des équerres, des balanciers et d’autres leviers. Ceux-ci ouvrent une soupape qui laisse entrer de l’air dans les tuyaux.

L’électricité n’est utilisée que pour actionner le ventilateur de l’orgue, et pas pour jouer. L’orgue n’a pas besoin d’électricité pour produire des sons. C’est le vent qui produit des filsdit Robin Côté.